D’ici la fin du siècle, la Chine perdra 700 millions d’habitants alors que l’Inde, qui n’aura pas encore terminée sa transition démographique, deviendra le pays le plus peuplé du globe. Elle sera un leader économique mondial mais sera-t-elle pour autant un modèle de société?
L’Inde est un grand pays de par sa superficie (3,3 millions de km2 soit 6 fois la France) et de par sa population (1,3 milliards d’habitants en 2017 – 1,7 milliard en 2050). L’Inde a contribué à l’essor des sciences et de la pensée humaine depuis plus de 5000 ans. C’est en Inde, bien avant les arabes, que le concept du zéro a été introduit, ses sciences et sa médecine, ses arts et sa littérature montrent des degrés de civilisation bien avant l’Egypte ou la Grèce antique. A l’époque de notre moyen-âge elle rayonnait pacifiquement en Indochine et en Indonésie. Elle inspire encore de nos jours nos réflexions philosophiques.
La diversité et la tolérance religieuse sont des traits significatifs de la culture indienne. Bien que Bhagat Singh, l’une des figures les plus connues du Mouvement pour l’indépendance de l’Inde fut un athée, seuls 7% des indiens se déclarent sans religion L’immense majorité des Indiens reste attachée à une forme de croyance. Même les adeptes de quelques variétés d’hindouisme qui nient l’existence d’un Dieu ou de tout être supérieur ne nient pas l’existence de toute chose transcendante.
Religion de près de 80% des Indiens, l’Hindouisme coexiste avec l’Islam (14% de la population) et de nombreuses autres religions : bouddhisme, christianisme, jaïnisme, judaïsme, zoroastrisme, sikhisme, etc. Cette diversité religieuse ne va pas sans créer quelques tensions et revendications autonomistes voire séparatistes, notamment au Cachemire, frontalier du Pakistan musulman. Le fait que la non-violence soit l’un des principes éthiques de l’Hindouisme majoritaire est souvent un facteur d’apaisement. L’Inde reste par ailleurs une démocratie : les libertés civiles sont protégées, la presse est largement indépendante. L’union indienne est un état fédéral laïc mais la protection de la religion est inscrite dans la loi. Ainsi que le remarque le général Lambale [1] grand spécialiste de l’Inde « la laïcité à l’indienne ne conduit pas à la recherche d’une société a-religieuse, elle ne signifie pas une mise à l’écart de la religion car la sensibilité religieuse est présente à fleur de peau chez la quasi-totalité des Indiens, quelle que soit leur confession. Elle préconise au contraire une coexistence voulue et acceptée de toutes les religions. La diversité indienne se fond dans les échanges d’idées et d’opinions, favorisés désormais par les traductions automatiques entre les principales langues de l’Inde (hindi, ourdou, bengali, tamoul )».
Après deux siècles de domination britannique, le sous-continent indien recouvre son indépendance en 1947 mais le pays subit alors une partition sanglante qui aboutit à la création de deux états : l’Inde (à majorité hindoue) et le Pakistan à majorité musulmane. La constitution de l’Inde moderne entre en vigueur en 1950, elle fait du pays une république parlementaire, l’Union Indienne, composée à ce jour de 29 états et de 7 territoires (dont Pondichéry, l’ancien comptoir français).
La langue officielle est l’hindi et le gouvernement central cherche à la développer mais l’anglais langue du colonisateur britannique, a gardé le statut de seconde langue officielle. Dix huit autres langues ont aussi un statut de langue officielle dans les différents états et territoires. Le dernier recensement linguistique connu fait état de 234 langues maternelles parlées dans l’Union indienne.
Autrefois connue pour ses famines catastrophiques, l’Inde, a réussi sa révolution verte et elle est devenu un pays exportateur de produits alimentaire, une situation malgré tout fragile compte tenu du taux encore élevé de l’augmentation de la population.
Depuis une trentaine d’année, le pays connu par ailleurs une croissance économique soutenue. Le secteur privé des services (banque, finance, informatique, etc.) et le secteur manufacturier (textile, pharmacie, chimie, acier, etc.) sont en plein développement. L’économie indienne est déjà devenue la troisième du monde, encore loin derrière les Etats-Unis qu’elle ne devrait dépasser que dans la deuxième moitié de ce siècle. Elle devient un acteur majeur dans le spatial : après avoir atteint la Lune et envoyé une sonde autour de Mars, l’Inde ambitionne de lancer une sonde vers Vénus et forme ses futurs astronautes. .
Avec 400 millions d’indiens connectés au réseau internet, l’Inde est le pays le plus connecté du monde après la Chine. Les startups pullulent et l’âge moyen des créateurs d’entreprise est de 28 ans ce qui en fait le pays où les entrepreneurs sont les plus jeunes du monde.
L’Inde, l’autre usine du monde, veut aussi devenir un leader du solaire et des énergies propres. Avec 300 jours d’ensoleillement par an, elle est l’un des premiers pays au monde pour le potentiel d’exposition solaire. Certains Etats ont un potentiel particulièrement intéressant comme l’Andhra Pradesh, le Bihar, le Gujarat, l’Haryana, le Madhya Pradesh, le Maharashtra, l’Orissa, le Punjab, le Rajasthan.
En moins de 10 ans, la capacité installée en énergie solaire photovoltaïque de l’Inde est passée de quasiment zéro à 100 GW. La puissance installée en photovoltaïque pourrait approcher les 200 GW en 2030, soit environ 120 fois la puissance prévue pour l’EPR de Flamanvile !
Elle pose également les premiers jalons pour créer une industrie nationale des batteries, une nécessité pour ce pays qui a prévu de basculer son parc de véhicules vers le tout électrique dès 2030, avec l’interdiction des véhicules thermiques. à partir de cette date
Malgré cet essor, la population reste encore pauvre dans son ensemble. Ramené au nombre d’habitant son PIB ne dépasse pas les 5000 $ par an [2] en parité de pouvoir d’achat.
Bien que démocratique, l’Inde est aussi très inégalitaire et archaïque sur beaucoup d’aspects : son système de castes, la place faite aux femmes, la corruption, les services publics et infrastructures parfois défaillants, etc. En dépit de ces problèmes, le décollage économique, bien réel, a permis l’émergence d’une classe moyenne aisée et d’une élite qui compte dans les affaires internationales. L’Inde forme chaque année, 400 000 ingénieurs, plus qu’en Europe ou aux Etats-Unis. Les talents indiens ou d’origine indienne sont présents partout dans le monde. Le patron de Google et celui de Microsoft sont nés en Inde.
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[1] Alain Lamballe, Docteur en sociologie politique, diplômé de l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales de Paris, en hindi et ourdou, in La Revue géopolitique – diploweb.com
[2] source OCDE
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